Les colibris nomades, un voyage à vélo en temps de pandémie

par | Mis à jour le 05/12/2021 | Les voyageurs | 2 commentaires

Il y a quelques semaines, j’ai pu interviewer Laura par téléphone alors qu’elle était en Turquie. Le but était de parler du projet qu’elle mène avec Bastien : Les Colibris Nomades. Un voyage à vélo autour du monde à la rencontre des acteurs du développement durable. Nous avons ainsi pu échanger sur leur voyage, l’adaptation de leur projet suite à la pandémie de covid-19, le voyage en période hivernale, etc.

Un échange très enrichissant que je relate avec beaucoup de retard car Laura et Bastien sont actuellement de retour en France et ont dû mettre le projet en pause pour des raisons personnelles.

Je suis Laura, j’ai 28 ans et je voyage avec Bastien qui a 30 ans. Nous sommes originaires du nord de la France. Après nos études dans le domaine de l’environnement nous avons travaillé au sein de petits bureaux d’études dans la région lilloise. Mais avec le temps nous nous sommes rendus compte que nous aspirons à plus de liberté : et le voyage à vélo semblait répondre à nos nouvelles aspirations !

Les colibris nomades

C’est votre premier voyage à vélo ?

Non, en 2017, nous sommes partis pour un tour de France à vélo pendant 6 mois, à l’époque nous utilisions notre valeureux tandem : ROOTS ! Avec lui nous avons parcouru 6 000 km avec pour objectif d’aller à la rencontre des colibris (à différentes échelles : qu’il s’agisse de petits ou de projets plus ambitieux et sur différentes thématiques liées au développement durable). Nous avons aussi profité de ce tour de France pour sensibiliser les générations futures aux thématiques de la protection de l’environnement et à notre mode de déplacement doux. Après ce projet, nous avons repris le travail (comme expliqué à la question précédente) avant de repartir en 2019 pour faire du woofing en France. Entre chaque woofing, nous étions à vélo. Et ce sont les différents hôtes Warmshowers que nous avons rencontrés sur la route qui nous ont motivés à partir pour un tour du monde à vélo ! Nous avions quitté notre appartement et notre boulot : alors n’était-ce pas le bon moment pour repartir?

Sur les routes depuis septembre 2020, quel est votre objectif ?

Comme c’était le cas en 2017, l’objectif du projet est toujours de rencontrer des colibris, (c’est-à-dire des personnes qui agissent en faveur d’un développement plus soutenable).

Pour notre tour du monde, on s’est laissé beaucoup plus de liberté et avons lâché prise sur l’organisation. Nous rencontrons des colibris au fur et à mesure, selon les opportunités qui se présentent à nous sur la route. Nous partageons tout cela sur les réseaux sociaux et faisons la promotion des acteurs rencontrés. 

Par ailleurs, nous faisons un travail de sensibilisation auprès des écoles (les fameuses générations futures). Nous avons environ 70 classes qui nous suivent et avec lesquelles nous sommes en contact quasiment toutes les semaines (par mail, en visio ou via des échanges des cartes postales). Nous leur envoyons aussi des dossiers thématiques de travail tous les mois en fonction des pays que l’on traverse et de nos rencontres. Nous faisions déjà ça lors du tour de France, mais à l’époque directement à leur rencontre. Cette fois tout se fait à distance mais les échanges sont aussi très enrichissants !

Quel est votre itinéraire ?

Nous avons eu beaucoup de plans suite à la pandémie. Nous avons d’abord reporté le départ en septembre 2020 (il était initialement prévu en Mars 2020). Et puis, nous avions prévu de faire du woofing en Grèce, mais nous n’avons pu entrer dans le pays. Depuis, nous nous laissons donc porter. 

Nous sommes actuellement en Turquie avant de partir aux Etats-Unis car tous les pays de la route de la Soie, du Pamir et d’Asie sont fermés. Nous n’étions pas forcément prêts pour prendre l’avion (pour des raisons environnementales), mais les Amériques semblent être la solution optimale pour nous à ce jour car nous pourrons s’y déplacer durant les 6 à 9 prochains mois.

Comment est venue l’idée de ce projet ?

Pour le Tour de France, nous sommes partis du constat que nous avions fait beaucoup d’études, nous avions appris de nombreuses choses théoriques mais nous n’avions aucune idée de ce qu’il se passe dans la pratique ! Le but du tour de France c’était d’aller voir comment tout ce que l’on nous a appris était mis en œuvre sur le territoire à différentes échelles. 

Le vélo était le moyen cohérent de se déplacer d’initiatives en initiatives. Puis nous nous sommes rendus compte que l’on adorait ça : le vélo, prendre notre temps, apprécier les paysages, faire des rencontres.

Faire le tour du monde était une envie. Le faire à vélo était devenue une évidence !

© François Lemancel

Vous avez voyagé à sept à un moment, c’était comment ?

Avec François et Lison d’abord puis avec Adrien, Antoine et Appoline (trois autres cyclos bretons), nous avons parcouru un bout de chemin en Macédoine du Nord et en Bulgarie. Ce qui fait que cette expérience est marquante, c’est qu’en raison des températures hivernales (-14°C la nuit), nous avons dû chercher à être hébergés chez l’habitant. Il faut imaginer que nous étions 7 à débarquer, alors c’était une mission au quotidien.

En tout cas, ça nous a permis de faire de bonnes rencontres et c’est ce qui fait que c’est un moment fort de notre voyage.

©François Lemancel

Comment le COVID impacte votre voyage, comment gérez vous ça?

Il y a eu plusieurs phases. Nous avons eu la chance de passer à côté de la majorité des restrictions. Nous n’avons eu aucun test PCR, aucun confinement, aucune quarantaine jusqu’en Turquie. 

Quelques jours avant de franchir une frontière, nous tentons de nous tenir informés au quotidien. En Macédoine du Nord, à 100km de la frontière bulgare, nous avons appris qu’il fallait un test PCR, 2 jours plus tard. Donc, nous avons pu nous adapter en fonçant directement à la frontière et en la franchissant la veille au soir de la mise en place des restrictions.

Ça ne vous fait pas peur de voyager en temps de pandémie?

Nous n’avons pas peur car nous sommes la plupart du temps en train de pédaler seuls sur nos vélos au milieu de la cambrousse. Quand on croise les gens, on fait minimum attention ! Au bout de 7 mois, nous n’avons pas été malades, nous n’avons pas été contaminés alors que notre famille en France l’a attrapée en respectant les règles. Donc on lâche un peu prise tout en faisant attention à nous et aux autres. 

Et au besoin, si il faut se mettre en quarantaine parce que l’on ne se sent pas bien ou parce que l’on sent que la situation est compliquée : on le fera !

Concrètement, comment ça se passe pour vous au quotidien ?

Il y a plusieurs phases dans notre voyage. Au début, nous n’avions pas l’habitude d’aller vers les gens pour leur demander l’hospitalité. Nous faisions davantage appel au réseau warmshowers dont la communauté est très présente en France et en Allemagne par exemple. Mais avec l’hiver et après la rencontre avec François et Lison, nous nous sommes rendus compte que c’était là que nous faisions les meilleures rencontres. Depuis nous allons plus facilement vers les gens. En Turquie et au-delà de l’accueil exceptionnel des habitants, nous pouvons à nouveau camper car la température nocturne est plus douce, c’est un plaisir également.

Quels ont été vos coups de cœur durant ce voyage ?

Nous avons adoré la Croatie, en plein mois de Novembre. On sortait des Alpes, on avait eu froid. Après un rapide passage en Italie et Slovénie, on est arrivé en Croatie où il faisait beau et où l’on pouvait camper. Nous sommes allés sur les îles où l’on a découvert des paysages extraordinaires (aux côtés de deux autres cyclos français d’ailleurs : Chloé et Guillaume).

Ce coup de cœur a sans doute été aidé par la pandémie de covid-19 car c’est normalement un pays qui est très touristique. Pour le coup, il n’y avait absolument personne. On plantait nos tentes dans des campings**** vides et fermés avec des vues splendides. 

La Turquie est un autre coup de cœur pour l’hospitalité des habitants ! Les gens sont très accueillants. Il ne se passe pas une journée où les gens ne viennent pas discuter, nous questionner, nous offrir à manger, à boire : c’est vraiment fou.

Quel budget avez-vous prévu pour ce voyage ?

Nous avons fixé un budget de 7€ par jour par personne. Nous avons une application que nous suivons tous les jours avec les dépenses quotidiennes. Le budget est plombé rapidement par les logements occasionnels que l’on loue pour avoir une connexion pour mener à bien le projet (contact avec les écoles notamment). Finalement, on arrive tout de même à se tenir à 15€ par jour à deux.

Avez-vous des conseils pour ceux qui voudraient suivre vos traces ?

On a eu la chance de n’avoir eu aucun souci au niveau matériel ou au niveau des vélos. Au niveau de la monture, nous avons les TX400 de Fahrradmanufaktur. En plus de 6 mois de voyage à vélo et plus de 6 000 km, nous n’avons eu qu’une crevaison ! On a voyagé avec d’autres personnes qui ont eu pas mal de problèmes avec leur vélo. Alors oui, ça fait partie du voyage et c’est bien de pouvoir résoudre ces problèmes, mais ça libère tout de même l’esprit d’avoir confiance en son vélo !

Niveau matériel, il faut se laisser aller. Mieux vaut partir avec ce que l’on pense avoir besoin et puis on pourra toujours faire quelques colis avec du matériel que l’on a en trop et qui ne nous sert finalement pas. On a beau lire beaucoup de comparatifs, être sûr de nous avant le départ, au final, il y a des produits dont on ne se servira pas ! Dans tous les cas, on trouve toujours le moyen de changer le matériel, les boutiques sont partout. Et s’il faut se faire livrer, il y a toujours une solution même si ça demande un petit d’organisation. 

Ah oui, un bon conseil pour les cyclo” : les vêtements en laine MERINOS ! C’est une véritable révolution pour nous. Inodore, agréable, léger, doux, facile à sécher, made in France : on leurs trouve que des avantages !

Une anecdote à partager ?

Niveau têtes en l’air, j’ai perdu mon portefeuille en Italie et des gens me l’ont ramené ! C’était super sympa. Bastien a quant à lui perdu sa Gopro en Allemagne. On a cherché pendant des heures, puis nous avons frappé à une maison en pensant l’avoir définitivement perdue. La dame qui a ouvert nous a répondu « ah oui, une Go Pro, on l’a trouvée, attendez j’appelle mon frère ». 

Le frère était censé la ramener, mais comme il n’arrivait pas, la dame est partie la chercher. Au bout d’une demi-heure, elle n’était toujours pas revenue. En fait, elle et son frère sont revenus une heure et demi plus tard. En route, elle était tombée en panne avce sa voiture. Ils sont revenus la Go Pro à la main, on n’y croyait plus. On était tellement heureux !

Évidemment, il y a aussi des rencontres qui nous ont marqués. Une fois, lorsque l’on était en Bulgarie, il faisait très froid et on cherchait un endroit où dormir. On a frappé à la porte d’une église, puis on a été ramené vers le maire qui nous a ouvert la bibliothèque municipale. Ils nous ont laissé tout le rez-de-chaussée avec un poêle à bois, donc niveau confort, on était au top. Au final, on est resté 3 nuits. Les gens du village sont venus nous apporter à manger, partager des moments avec nous, nous faire goûter l’alcool local. C’était une rencontre vraiment marquante !

Où est-ce-que l’on peut vous suivre  ?

ITW Les Colibris Nomades

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2 Commentaires

  1. Laura Vermeulen

    Encore un grand merci à vous deux pour cet article qui retrace notre aventure à vélo de plus d’un an sur les routes.
    On se replonge dans le récit et dans les photos avec beaucoup d’émotions … c’est top !

    On commence doucement à rêver d’un nouveau départ, mais pour le moment on se concentre sur un séjour de woofing dans le Gard, au sein d’une ferme productrice de safran, de grenade et de spiruline.
    D’ailleurs les producteurs seraient heureux d’accueillir les voyageurs à vélo de passage ici le temps d’une soirée étape ou le temps d’une petite visite de la ferme pour en apprendre davantage sur les bienfaits de la spiruline durant les aventures à vélo (https://www.manjolive.fr/spiruline/sport/).

    En tous cas, nous nous sommes régalés à suivre votre voyage aux côtés de Ringo : bravo à vous 3.
    Alors, à bientôt dans le Gard ? 🙂
    Bon retour chez vous.

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    • Mila

      Coucou Laura,

      Je viens tout juste de mettre à jour l’adresse de votre site suite à ton commentaire et pouf, la présentation s’est toute cassée (nous avons un gros bug dernièrement sur notre blog à cause d’une extension qui a été arrêtée par son créateur…) ! Je te promets de corriger tout cela dès que possible.
      Profitez-bien de votre séjour dans le Gard, c’est top pour l’accueil. Je vous souhaite une bonne continuation et un prochain beau départ !
      Bonne journée,
      Mila

      Réponse

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