On a tenté de sortir de la Hongrie avec une carte d’identité périmée !

par | Mis à jour le 23/01/2021 | Hongrie | 6 commentaires

Avec l’extension de durée de validité de la carte d’identité, on se retrouve vite dans une situation compliquée aux frontières.

Surtout lorsque le garde frontière ne fait pas vraiment preuve de patience, d’écoute et d’empathie. C’est ce qu’il s’est passé en tentant de sortir de la Hongrie. La policière des frontières, déterminée à ne pas nous laisser passer, n’a rien voulu savoir. L’extension de validité de la carte d’identité, ils ne connaissaient pas, et c’est tout.  Alors, nous avons fait comme toute personne logique dans ces cas là : nous sommes passés par une autre frontière !

La Hongrie et l’immigration : une histoire brisée

Quand même, quand on lit dans les journaux que la Hongrie a baricadé ses frontières avec la Serbie, on se dit que c’est un comportement étrange pour un pays qui a rejoint l’Union Européenne. C’est plutôt scandaleux même. Mais finalement, c’est un peu loin tout ça…

Et puis, on finit par oublier que cette terrible frontière s’est transformée en mur, sous prétexte de protéger l’espace Schengen. Évidemment, quand on flâne dans les rues de Budapest, nous oublions tout ça aussi. Dans les thermes, tout paraît beau, tout paraît rose.

carte d'identité Policeman_at_Hungary

Arrivé au moment fatidique du passage à frontière, j’ai été rattrapée par cette réalité

Ce qu’il s’est passé, c’est une simple mésaventure humaine : mon passeport est resté en République Tchèque, dans un camping. Le camping l’a posté à ma maman. D’après les informations que j’avais à disposition sur le site de l’ambassade, la Hongrie, la Serbie et même la Croatie avaient officiellement accepté l’extension de validité de ma carte d’identité. Je ne voyais donc pas de danger et comptais sur ma maman pour m’envoyer mon passeport en Bulgarie ou Roumanie.

Avant de partir pour ce long périple, j’ai réalisé trop tard que ma carte d’identité était “fichue”. Le temps de faire les démarches, j’étais bien loin de la France. Je comptais donc ne pas perdre mon passeport, ce qui n’est évidemment pas arrivé ! Alors, quand on n’a plus que la carte d’identité… on fait avec.

L’histoire

Arrivés à la frontière Hongrie – Serbie, nous devions passer un petit poste de contrôle. Le premier depuis le début du voyage. Nous étions dimanche, il y avait trois gardes. Ils nous ont fait tout un sketch pour nous montrer que l’on ne passait pas. Fermeture de la fenêtre depuis laquelle nous parlions, fermeture des barrières. Je leur explique que ma carte d’identité est toujours valide. Ils me disent que non. Je vois bien qu’ils ne comprennent pas un mot d’anglais même s’ils affirment le parler.

Nous tentons d’avoir une conversation en “google translate” avec la policière. Elle est butée, elle tourne tout le temps la tête et souffle, exaspérée. Elle nous refuse l’entrée, devient légèrement agressive. Quelle solution ? “Go back to France or new passport.” Ok, mais moi maintenant, j’ai violemment envie de quitter la Hongrie.

Oui, parce que le problème ici, ce n’est pas que la Serbie refuse mon entrée. D’ailleurs, elle n’a pas son mot à dire. Il est clair que les deux pays sont en tension. La Hongrie a quand même érigé un foutu mur de barbelés à sa frontière.

frontière - carte d'identité Hongrie

Nous étions pris au piège

Alors, nous avons réfléchi, un peu KO par cette nouvelle. Comment faire finalement pour continuer notre trip ? Il est clair qu’il faut que je récupère mon passeport. Mais où ? Où l’envoyer ? Belgrade ? Zagreb ? Budapest ? Oh non ! On ne veut plus rester en Hongrie.

En réfléchissant, on se dit qu’il y a peut-être un autre moyen. Ça pourrait être d’attendre qu’ils y aient des nouveaux gardes, prêts à vérifier les informations fournies. Ou, tenter la frontière croate. Je commence à réfléchir, poste la question sur des forums de voyageurs, essaie de trouver une solution. Nous décidons de nous diriger vers la Croatie à 11 km.

Une frontière vraiment fermée

Nous avons emprunté d’autres chemins pour récupérer la frontière. Nous l’avons longée pendant un moment, en espérant passer un petit pont pour se rendre en Croatie. Tous les 500m, se trouvaient des militaires, armés. Des policiers fouillaient les champs, d’autres survolaient le périmètre avec leurs drones. D’autres quadrillaient les environs, vêtus de gilets jaunes (oui, c’est un peu étrange pour des militaires). J’avais lu tout ça. Je savais ce qu’ils cherchaient. Pourtant, c’était ultra angoissant de passer par là. On pouvait ressentir la tension des militaires, même si on voyait bien qu’ils n’avaient rien contre nous.

La seconde frontière que nous avons tenté de passer était complétement fermée et quadrillée. Il a donc fallu remonter jusqu’à Mohacs, une petite ville du sud de la Hongrie pour redescendre sur une autre frontière. Arrivés dans la ville, après plus de 60km parcourus, nous étions bien trop épuisés pour tenter un nouveau passage. Nous avons pris une (rare) nuit à l’hôtel.

Il n’y a rien de grave, mais tout ça, ça m’a bien stressée

C’est fou ce qu’un petit événement peut chambouler nos esprits. Il n’y avait rien de grave et j’avais beau relativiser tout ça, j’ai ressenti une colère monstre. C’était insupportable de se sentir prise au piège pour l’histoire d’un papier qui n’est plus, en apparence, en règle depuis deux mois.

Je me suis levée avec une boule au ventre avant de partir vers la frontière croate. J’avais peur d’être bloquée et de me prendre une seconde porte. C’est rien, ce n’est pas grave, mais dans notre voyage où tout a été si lisse, ça m’a paru insurmontable. Il fallait encore faire face à ces gardes armés, ces drones et passer cette foutue frontière…

Je pense que tout ça venait d’un point plus profond. Cela faisait déjà plusieurs jours que nous faisions de longues étapes, j’étais fatiguée. La nuit avant, nous avons dormi dans un camping à l’état scandaleux. Le genre d’endroit où tu te sens toujours aussi sale après avoir pris une douche. Le matin, en partant du camping, j’ai regardé Denni, et lui ai dit : “aujourd’hui, il nous reste tout pile 4 mois de voyage”. À ce moment-là, j’ai senti qu’il pensait comme moi. 4 mois, ça ne nous a pas fait “waouh”. Je crois qu’on était dans une période où nous étions un peu moins enjoués. Heureusement, les serbes ont su nous redonner le plaisir de voyager !

N’empêche, nous sommes bien privilégiés en tant que français

“Nan, mais il t’a fallu faire un tour d’Europe pour t’en rendre compte ?” Non, j’ai toujours su que j’avais de la chance d’être née dans le bon pays. J’ai toujours su que j’avais de la chance que mes études soient faciles d’accès. Grâce à ça, j’ai pu apprendre à réfléchir, à développer un esprit critique, que j’utilise avec enthousiasme (parfois même un peu trop) de temps à autre.

extension carte d'identité

Certes, c’est bien de parler, de lire, de débattre. Mais c’est facile quand on est bien assis confortablement dans son petit cocon quotidien. En tout cas, ce que j’ai ressenti devant cette frontière hongroise barricadée et barbelée, n’a rien de philosophique. Ça ne m’a rien appris de plus que ce que je savais (ou pas). Mais, ça m’a profondément dégoûtée de voir ça, dans un pays européen. Tant d’argent déployé à la chasse à l’homme, à l’interdiction, au rejet de l’autre.

Oui, parce que c’est pour cette raison que la Hongrie est si catégorique sur ses passages de frontière. Pour la chasse à l’homme. Franchement, cette frontière est tout aussi débile qu’inutile. Les murs n’ont jamais arrêté l’être humain, on le sait depuis longtemps.

Je ne suis pas passée là ? Très bien, eh bien, je vais passer par ailleurs !

En attendant, dans les petits villages de la Hongrie, les agriculteurs travaillent toujours avec leurs chevaux. Ceci n’est pas pour me déplaire mais est révélateur d’un pays qui déploie ses moyens financiers dans des choses non nécessaires selon moi. D’ailleurs, la Hongrie manque sérieusement de diversité. Elle est repliée sur elle-même. Les couleurs de peau sont légèrement variées seulement et uniquement grâce au tourisme.

La diversité, la Hongrie ne veut pas en entendre parler. Il m’est arrivé à plusieurs reprises de dire à Denni que la mixité du 19e, à Paris, me manquait ici. À Budapest, qui est une ville que j’adore, que je trouve magnifique, agréable et vraiment dynamique, c’est totalement ce qu’il manque. Nous sommes pourtant passés dans les quartiers populaires.

Moi, j’ai finalement pu passer…

C’est fou, j’ai réussi à passer les deux frontières plus aisément que la première le lendemain. Nous avons imprimé les documents traduits de l’ambassade expliquant que la carte d’identité est valide. Nous y sommes allés francos, avec les documents en main, avec également la photocopie de mon passeport. Puis, nous avons expliqué que dans tous les cas, mon passeport était en train d’arriver à Belgrade.

Nous avons dû attendre à la frontière. Plutôt pas mal même. Les gardes passaient de temps en temps nous rassurer, “no worries, it should be ok”. Et nous sommes passés. Ils ont pris la peine de vérifier mes dires. Désormais en Serbie, je n’ose plus sortir du pays. Pourtant, il y a plein de jolies choses à voir côté Croate, mais j’ai peur d’être à nouveau bloquée à la frontière. Je me sens un peu “illégale” ici, même si ce n’est pas le cas.

Peu importe, les serbes sont des personnes magnifiques et plutôt bienveillantes. Nous sommes invités à prendre le café. On nous offre des fruits (bio) dans la rue. Les automobilistes font attention aux cyclistes. C’est déjà chouette d’avoir quitté la Hongrie !

…Mais les autres ?

Franchement, être français, c’est trop facile. Tu es né du bon côté et c’est tout. Tu finis toujours par trouver un moyen, même avec ta carte d’identité périmée. D’ailleurs, juste avec ta carte d’identité (valide), tu rentres dans pas mal de pays comme dans un moulin. Et puis, si tu es en galère, tu as de l’argent ou encore la possibilité de rentrer assez aisément chez toi.

Pourtant, les citoyens des pays que l’on va visiter si facilement ont parfois besoin de demander un visa pour passer ne serait-ce qu’une semaine de vacances en France ! D’autres, sont bloqués à des frontières avec une violence qui fait froid dans le dos. On dirait une chasse aux criminels… Je trouve ces pratiques extrêmement violentes.

L’être humain a toujours été un migrateur. Laissons-le passer. Surtout s’il fuit la guerre !

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6 Commentaires
  1. Chevalier David

    Ben voilà, maintenant que j ai un velo, plus de boulot, et que ce qui se passe en France me pousse à réfléchir a d autres perspectives de vie et après avoir suivit ( j avoue de loin ! ) vos aventures, l envie est là,
    Tout larguer et voyager. . . Merci larguer

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    • Mila - Entreprendre le Monde

      Génial que tu t’y mettes ! Tu comptes partir quand du coup ? Ça va être une chouette aventure, et même dans les moments un peu difficiles, ça reste chouette. On s’en souvient même davantage et on en rit (parfois seulement après coup je l’admets, mais on finit toujours par en rire!)

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  2. L'independant

    “manque de diversité” “les frontière c’est le maaaal”

    vous ne faite que défendre l’idéologie de TF1 et de BFMTV, penser par vous même et arrêter et de répéter ce que vous entendez dans les médias de masse.

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    • Mila - Entreprendre le Monde

      Je n’avais pas noté que BFMTV et TF1 défendaient l’idéologie de l’ouverture. D’ailleurs, les rares fois où il m’est arrivé de me trouver devant une télévision durant ces 10 dernières années m’ont plutôt fait penser au contraire. C’est drôle les interprétations que l’on peut avoir.
      Je vous remercie pour votre commentaire très argumenté. 🙂

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    • Mila

      Merci beaucoup Armelle ! 😀 À très vite alors. On découvre le mag, c’est top. 😀

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